Mon avis sur Babelio, LibraryThing, Livraddict et Goodreads

Article ambitieux dans le sens où je vais essayer de vous proposer une analyse pertinente de mon expérience de ces 4 sites de bibliothèque en ligne : Livraddict, Babelio, Librarything et Goodreads. Je parle d’analyse pertinente à défaut de parler d’article pertinent parce que je suis entrain de réinventer l’eau tiède : ce genre d’article existe déjà dans toutes les langues, il suffit de chercher sur les moteurs de recherche… Le but du jeu est double : d’une part, expliquer une fois pour toute à ceux qui me connaissent pourquoi je me trouve ici et pas là et d’autre part, apporter un supplément d’information à ceux, innombrables, qui arrivent sur ce blog pour lire mon vieux billet Choisir entre Babelio et Livraddict de 2011 (une sorte de service après vente…).

Pour ceux qui ne connaissent pas, je me dois quand même de poser la problématique. C’est un sujet qui n’intéresse que les lecteurs plus ou moins assidus. Si la lecture est une activité essentiellement solitaire, il y a un moment où il y a une interaction avec les autres : (i) il est utile de savoir si le livre qu’on veut offrir n’a pas déjà été lu, (ii) les plus organisés ressentent parfois le besoin de faire l’inventaire de ce qu’ils ont lu et/ou ce qu’ils ont sous la main et (iii) enfin, le principal à mes yeux, les recommandations entre lecteurs.

Les sites de bibliothèques en ligne qui existent depuis quelques années permettent aux utilisateurs de jouer sur tout ces tableaux. Entendons nous bien : pour l’internaute débutant ou expérimenté, il n’y a pas besoin d’utiliser ce genre de site, si on veut proposer une liste de lecture à son entourage. Il suffit de faire sa propre liste en page web, d’utiliser les outils comme google docs, une colonne Titre, une colonne Auteur et le principal est là. Même chose si on veut faire des statistiques pour soi-même, faire des listings précis : il n’y a pas besoin de publier ça en ligne, on peut le garder pour soi et se faire un truc personnalisé aux petits oignons. Et pour ce qui est des recommandations, il y a déjà des tas de magazines (en ligne ou en papier), des blogs (comme le mien mais aussi des milliers d’autres), des forums de discussions. Les sites de bibliothèque en ligne n’ont de sens que pour ceux qui veulent jouer sur tous ces tableaux en même temps. Chacun de ces 4 sites remplissent leur rôle à ce niveau-là, ils ont tous la base. Ceci dit, certains ont leur petite spécificité et leur lacune qui peuvent nous attirer ou nous rebuter.

Taille des réseaux sociaux : ces sites sont avant tout des réseaux sociaux (comme Facebook), leur intérêt réside dans la taille, la justesse de leur base de données et l’interactivité entre celle-ci et les utilisateurs et l’interactivité entre les utilisateurs. Dans ce domaine aussi, la taille compte : plus il y a d’utilisateurs, plus il y a de livres, plus il y a d’interactions.

En ce domaine, c’est Goodreads qui occupe la tête avec ses 20 millions d’usagers internationaux atteints courant 2013 (570 millions d’ouvrages, 24 millions de critiques). Il n’y a pas moyen de dire combien il y a d’utilisateurs francophones.

Ensuite vient Librarything avec entre un peu plus de 1,7 millions d’utilisateurs (87 millions de livres et 2 millions de critiques). Parmi ceux là, il y a 17000 francophones (740000 livres francophones et 25000 critiques).

Babelio est la plus grosse communauté francophone avec 100 000 membres, 5 millions de livres et 350 000 critiques.

Enfin, Livraddict ferme la marche avec 12 000 membres et plus de 80 000 livres.

A ce niveau-là, il faut distinguer Goodreads/Librarything de Babelio/Livraddict : si vous n’êtes pas anglophone, la taille des bases de données des deux premiers sites ne vous intéressera pas et Babelio devient logiquement plus intéressant pour vous. Carton jaune pour Livraddict.

Justesse de la base de données : C’est un sujet assez délicat dans le sens où les bouquins sont très souvent édités plusieurs fois (grand format, format poche), sans compter les traductions, les découpages, les ré-éditions, les intégrales, etc. Il y a les utilisateurs qui sont partisans de la plus grand précision (donc une fiche par édition) et ceux qui préfèrent réunir tout ça en une seule fiche.

Le cas le plus chiant que j’ai eu l’occasion de voir, c’est la gestion du feuilleton le Trône de fer écrit par George R. R. Martin

Pour moi, les plus malins, ce sont ceux de Livraddict qui permettent de faire une grosse fiche pour chaque oeuvre avec l’exposition assez transparente de chaque édition proposée pour cette l’oeuvre et un système assez lisible pour les séries. Il n’y a qu’à voir la fiche du tome 1 du trône de fer

Goodreads et Babelio fonctionnent de la même manière en regroupant les différentes éditions d’un même bouquin mais ne proposent pas pour autant de lien évident vers la série le cas échéant.

Enfin, Librarything ménage la chèvre et le chou en proposant la fusion des différentes éditions d’un même livre et la possibilité d’intégrer chaque oeuvre dans une fiche « série » qui lui correspond.

Il y a bien des listes sur les autres sites mais ce n’est qu’un pis aller, un bricolage pour proposer une gestion des séries. Ca manque d’élégance. Carton jaune pour Goodreads et Babelio.

Gestion des mots-clés, des catégories, etc.

C’est un aspect qui revêt deux utilités, la première, c’est le classement des oeuvres par exemple pour distinguer dans le fratras des centaines de bouquins qu’on a pu lire, pour faire le tri entre les romans et les bandes dessinées, les mangas et les comics ou pour distinguer les autobiographies des romans de science-fiction, etc. La seconde utilité, c’est d’optimiser la recommandation d’oeuvres : exemple si j’attribue le mot-clé « commandos de france » au bouquin de Maja Destrem, à celui de JM Boris et celui de Christine Jordis, vous pourrez plus facilement retrouver ces livres (et les autres sur le même thème) et il y a fort peu de chance pour voir un jour une catégorie « Commandos de France » sur un site de bibliothèque en ligne…

Il n’y a pas de gestion ni de mots-clés, ni de catégories sur Livraddict, carton jaune.

Sur Goodreads, il n’y a pas de mots-clés mais un système de catégories assez dirigiste qui le remplace partiellement. Ca ne permet pas d’être très descriptif mais ça a le mérite d’empêcher les utilisateurs de mettre n’importe quoi à leurs bouquins.

Librarything propose un système très complet de gestion de mots-clés, un système pour gérer nos propres catégories et à ça s’ajoute un système collaboratif de connaissances sur l’auteur et l’oeuvre (prochainement des boites d’édition) comme les dates, les lieux, les séries.

Babelio propose lui aussi un système de mots-clés mais, à mon avis, ce dernier a été corrompu par un choix éditorial assez discutable : pour encourager les utilisateurs à contribuer au contenu du site de Babelio (critiques, citations, fiches descriptives, mots-clés), le staff de Babelio a créé un système d’insignes et de points : exemple, plus on critique d’oeuvres de science-fiction, plus on a de points pour l’attribution de l’insigne Science-fiction. C’est sympa sur le papier mais ça a incité plein de gens à tricher en attribuant des mots-clés inadéquats dans le seul but d’obtenir des points et des insignes. Ce système d’insigne est facultatif mais malheureusement, il a un impact sur les mots-clés (s’ajoute en plus la génération automatique de mots-clés en fonction de la fiche descriptive de l’éditeur, exemple, « c’est l’histoire de untel qui part à l’aventure » proposera les mots-clés « histoire », « untel » et « aventure »). Les mots-clés n’intéressent pas tout le monde mais le cas échéant, ça joue sur le système de recommandations.

Cette histoire de mots-clés et de catégories, finalement, c’est au gout de chacun. Pour ceux qui s’en foutent, cet aspect des sites de bibliothèque n’a aucune importance voire paraitre une usine à gaz quand ils se retrouvent devant les fiches de Librarything. Pour ceux qui utilisent ce système pour rechercher ces bouquins, pour trier leur bibliothèque, les sites comme Livraddict et Babelio prennent logiquement un carton jaune.

Recommandations automatiques : les bases de données de ces sites permettent de relier les oeuvres et les auteurs entre eux sur la base de leur popularité (nombre d’utilisateurs les ayant lus), de leur appréciation (la note qu’on leur donne) et leur description (les mots-clés). Grâce à des formules secrètes, chaque site propose à l’utilisateur tout un système de lectures recommandées.

Livraddict ne propose rien : carton jaune !

Les recommandations de Babelio sont basées sur la description des oeuvres (les mots-clés) et leur popularité. Ainsi, il n’est pas rare qu’une oeuvre lue par un très grand nombre mais appréciée de peu de personnes (donc avec une note médiocre) apparaisse dans les premiers résultats recommandés. Ajoutons à ça les problèmes d’attributions de mots-clés qui viennent créer des interférences et on se retrouve avec des recommandations automatiques sans aucun intérêt. Carton jaune !

Librarything et Goodreads semblent fonctionner sur un système différent. Système qui se base sur les notes données par les utilisateurs mais aussi par les recommandations effectuées par les utilisateurs. En effet, il y a la possibilité sur ces sites de proposer des recommandations  sur chaque oeuvre. Sur Goodreads, on nous propose des bouquins seulement dans les catégories favorites, sur Librarything, il y a une poignée de système de recommandations divers plus ou moins pertinents. Sur ce dernier, j’ai surtout eu des recommandations pour les séries que je n’ai pas terminées, les auteurs dont je n’ai pas tout lu. Au final, ce n’est pas beaucoup mieux que les autres sites. Je pense que ces systèmes automatisés ne sont pas très judicieux. Je préfère aller de livre en livre sur la base de la description (mots-clés). Le mieux étant bien sûr ce qu’on apprend auprès des autres lecteurs sur le site.

Interactions avec la communauté :

C’est un des points que je trouve important sur ce genre de site (sinon on fait un truc soi-même dans son coin), tous les sites proposent des forums de discussions ou des groupes du même type.

A mes yeux, le plus sympa est Babelio dans le sens où on a un mur comme sur Facebook sur lequel on a les actualités de notre liste de contacts. C’est perfectible mais la visibilité des activités de nos contacts encourage à interagir. Petite cerise sur le gâteau, on a la possibilité de réagir aux critiques que font les gens, je n’ai pas vu ça sur les autres sites. Je trouve que ça crée un lien entre les utilisateurs. Ce qui manque par contre sur Babelio, c’est ce que Librarything et Goodreads proposent : la possibilité de suivre l’actualité d’utilisateurs sans aller plus loin, comme sur Twitter. C’est important parce que par exemple sur Babelio, il y a des gens qui veulent nous suivre mais la réciproque n’est pas vraie. Or il arrive que certains soient hyperactifs au point d’être soulants…

Le carton jaune va à Livraddict et Goodreads qui ne proposent finalement qu’un forum et même pas d’application pour trouver des lecteurs qui ont les mêmes lectures que nous… (ce que font Babelio et Librarything chacun de leur manière).

Interopérabilité avec le reste d’internet :

Dans cet aspect, il y a à mes yeux la possibilité de poster des liens externes, avoir des fichiers d’exports complets, intégration avec les autres réseaux sociaux (Facebook, Twitter, etc.), des liens RSS/atom, etc.

A ce niveau, il y a à boire et à manger : Livraddict fait carrément la promotion de nos liens externes, c’est une vraie collaboration mais ne permet pas d’exporter notre bibliothèque. Babelio permet de faire des liens externes mais on gagne moins de points pour les insignes et si on peut exporter notre bibliothèque, on ne récupère pas les mots-clés qu’on a pu mettre (ce qui est une grosse valeur ajoutée de ce genre de site). Librarything ne permet pas de faire la promotion de liens externes mais le système d’exportation est très complet. Goodreads ne permet pas de faire de liens externes et comme il n’y a pas de mots-clés à exporter, c’est lui qui hérite du carton jaune.

Prix :

Seul Librarything est payant : 10€/an ou 25€ à vie. Pour le paiement annuel, on peut donner moins si on veut. Tous les sites utilisent un partenariat avec Amazon pour se rémunérer. Je suis partagé, je sais que le paiement est un gage d’indépendance mais cette indépendance, je ne sais pas si elle est réelle. Ça n’est pas réellement un fardeau pour moi mais je pense que ça limite l’expansion de Librarything, je lui mets un carton jaune pour ça (mais je n’y mets pas le cœur…).

Conclusions :

Plus le site est complet et moins il est lisible (et réciproquement) : on a Librarything qui tourne à l’usine à gaz et à l’opposé Goodreads et Livraddict qui sont très intuitifs mais dont certaines lacunes peuvent être rédhibitoires. Babelio a plein d’avantages notamment sur le côté communautaire mais il y a certains aspects foireux qui font qu’au « quotidien », si on est exigeant, on en vient de plus en plus à pester. C’est d’ailleurs ce qui m’a conduit à tester les autres sites. Personnellement, mon utilisation de ce genre de site a évolué au fil des années : au début, je cherchais un moyen plus pratique pour partager mes billets de blog, Livraddict m’avait séduit puis Babelio, qui propose autant sinon plus que Livraddict, m’avait mieux satisfait grâce aux échanges avec les autres utilisateurs. Au fil du temps, je délaisse ce blog et son utilisation en tant que recommandation de bouquins et je cherche désormais à la fois un système de recherche bibliographique complet (selon l’auteur, le thème, etc.) soit un moyen d’analyse objectif de mes propres lectures. A ce moment là, il me faut un système le plus complet possible. Librarything répond actuellement le mieux à mes attentes et ce d’autant plus que j’adhère à cet aspect international. Il y a quelques frustrations (quand je parle d’usine à gaz, ce n’est pas un vain mot) mais c’est moins pire qu’ailleurs.

Je pense désormais que je vais proprement délaisser Livraddict et Goodreads pour me concentrer sur Librarything tout en restant sur Babelio d’une part pour garder contact avec ceux qui y restent et aussi dans le doux espoir que les choses changent. De toute manière, c’est plus facile de transférer l’information de Librarything vers Babelio que le contraire…

Mise à jour Décembre 2014 :

A ce jour, j’ai complètement adopté LibraryThing et abandonné Babelio : il y a un gouffre entre les deux systèmes. LibraryThing qui avait l’air d’être une usine à gaz s’avère très permissif au niveau de la gestion des données (la structure de notre bibliothèque mais aussi les informations concernant les oeuvres et les auteurs). C’est réellement du Web 2.0 comme Wikipedia. Et on peut exporter l’ensemble de ces données…

Il souffre quand même de manque de popularité : Outre l’abonnement, le référencement du site est centré sur le côté anglophone et n’a donc aucune visibilité sur le web francophone. Il ne peut donc évoluer que sur la base du bouche à oreille. Tant pis.