"La Voix des ainés" de Pierre Grimbert

Voisins lecteurs, cet article de critique « littéraire » est aussi un outil pour vous conforter dans l’idée de lire ou non le livre dont je vais parler ci-dessous. N’hésitez donc pas à signaler s’il vous a été utile ou pas, je peux corriger le tir 😉

« La Voix des ainés » de Pierre Grimbert

Ca commençait à faire longtemps que je n’avais pas pointé le bout de mon nez ici. Depuis cette bouse que fut « Aubemort », j’ai, entre autre, eu le temps de finir le 3ème tome de la série « Les Enfants de Ji », elle-même 2ème volet d’une saga autour de l’Ile de Ji, le tout par Pierre Grimbert. Je vais profiter de ce billet pour parler non pas de ce 3ème bouquin mais de la saga : j’ai une pensée pour ceux qui ne l’ont pas encore entamée et parler de l’histoire du 3ème bouquin serait du pur spoiling.

Etape 1, posons le décor : de prime abord, on tombe sur un univers médiéval-fantastique : un matriarcat, une « oligothéocratie », des nordistes pacifiques, une poignée de royaumes féodaux plus ou moins sophistiqués, etc. Mais pas d’elfes, de nains et autres tolkienneries (j’ai pas dit que j’étais contre ce genre de choses… loin de là), on reste entre humains. Bref… Un beau jour, un peu partout dans ce monde connu, à peu près en même temps, de mystérieux assassins armés de dagues empoisonnées s’en prennent à diverses personnes sans lien apparant. Certains survivent : les protagonistes, certains se connaissent. Chacun d’eux se remettent tant bien que mal des tentatives d’assassinat et commence à se poser des questions : pourquoi eux ? qui ? En se creusant un peu la cervelle, ils trouvent un indice : ils sont tous les descendants d’ambassadeurs qui ont jadis été envoyé sur une mystérieuse île, l’île de Ji. Je m’arrête là pour le posage de décor, ce serait un crime d’aller plus loin.

Etape 2, mon opinion : c’est un polar (super l’opinion…). Une quête dans un univers fantasy avec des guerriers, des assassins, du mystique, des pouvoirs occultes mais c’est avant tout un polar. Et ça j’ai bien aimé. Du premier bouquin au dernier que j’ai lu, soit 5 romans si j’ai bien compté, Pierre Grimbert se débrouille pour nous maintenir dans le doute. Il y a toujours un truc à découvrir, quelque chose pour nous (les protagonistes et le lecteur) mener de l’avant dans le récit. Bien des écrivains de fantasy s’y essayent mais de mes lectures, il me semble que c’est Grimbert qui s’en sort le mieux. Même si j’ai découvert bien des secrets au fil des 5 premiers bouquins, j’attends impatiemment le 6ème ! Et pas pour voir comment tel épisode va être traité, pour lire un exercice de style mais parce que je me pose encore des questions. Je ne lis pas de polar habituellement, je ne sais pas évaluer cette saga sur l’échelle du bon gout polaristique mais elle a le mérite de me maintenir en haleine. Rien que ça, ça mérite sa place dans mes bouquins préférés…

Ensuite, il y a le traitement de tout ça, les protagonistes, l’univers dans lequel ils évoluent… Mis à part le fait qu’ils ont le défaut d’être gentillets, Pierre Grimbert a su les rendre attachants en nous les faisant découvrir un par un et en dévoilant petit à petit des pans de leur personnalité au fur et à mesure que les protagonistes eux-mêmes faisaient connaissance entre eux. On est loin des personnages insipides et/ou catapultés de Aubemort ou du Royaume de Saramir. Ils nous sont familiers sans être caricaturaux comme la plupart des personnages des Guerriers du silence de Pierre Bordage. Ils ne sont pas incohérents comme dans l’Assassin Royal. C’est très bien huilé. Je vais encore citer un autre bouquin mais ça me fait penser un peu à du David Eddings, dans ses premiers bouquins, la Belgariade (où on découvre les persos) et Pierre Grimbert a le bon gout de s’arrêter avant au niveau familiarité avec les personnages (avec Eddings, ça devient vite du Cosby Show, avec la boîte à rires et les applaudissements du public lecteur à chaque fois qu’un second rôle sort une blagounette pour faire rire les fans). Seul défaut, un peu trop de pudeur, de bon fond. Ca manque de coups de pute, de mesquinerie. Je serais curieux de lire un bouquin de Grimbert qui met en scène un protagoniste avec un mauvais fond ou juste gris ou pleutre… Pour faire bref, Grimbert s’en sort aussi très bien sur l’univers en question, je ne peux pas trop en dire sans trop en dévoiler mais sachez déjà que chaque paysage a un petit côté original. De plus, on sent que ce monde tournerait de lui-même s’il n’y avait pas les protagonistes, je ne sais pas si je me fais bien comprendre : il me semble suffisamment riche pour ça (sans être les Terres du Milieu non plus, faut pas déconner…).

Je trouve que Pierre Grimbert a rempli mon cahier des charges avec un bon équilibre au niveau des rapports Protagonistes/Lecteur, une intrigue prenante, un univers riche. Pour moi, sans être le summum, c’est désormais comme un label : si c’est moins bien que Pierre Grimbert, c’est pas bien. Tout simplement. Et même si j’ai tendance à parler de bouquins que je n’aime pas, j’en ai lu quelques uns qui, à mes yeux, ont le label Grimbert : le Trône de Fer, la Compagnie Noire, La Route, etc.

initialement publié le 20/11/2008